N°2 / Regards de jeunes chercheurs sur l'art et la littérature d'Italie et d'ailleurs

The Magician’s Nephew: narration et idéologie dans les traductions française et italienne

Paola Artero

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Paola Artero

 

The Magician’s Nephew :

narration et idéologie dans les traductions

française et italienne

 

 

1. Introduction

      Cette étude a été réalisée dans le cadre de notre projet de thèse, centré sur les sept romans qui composent The Chronicles of Narnia (Lewis, 1950-1956). Débuté à la fin du 2011, il s’inscrit dans la perspective de la « Traductologie de corpus » (Corpus-based Translation Studies, CTS), qui est désormais un courant d’étude bien reconnu au sein de la traductologie elle-même, depuis qu’en 1993 Mona Baker en imagina les potentialités dans son article : « Corpus Linguistics and Translation Studies : implications and applications ». La CTS a su intégrer, d’une part, les avancées de la linguistique de corpus, et d’autre part les fondements théoriques de la traductologie descriptive (Toury, 1995), sur le sillage du tournant culturel que la traductologie a expérimenté au cours des années 1990 (Bassnett et Lefevere, 1992), tant au niveau théorique que méthodologique ; les Translation Studies ont alors commencé à s’intéresser plus systématiquement aux contextes culturels et politiques de production des œuvres traduites, et à l’étude de l’idéologie dans le texte. En toile de fond, les travaux de la Manipulation School, née aux alentours des années 1970 en Israël et dans les Pays Bas1, la Polysystem Theory, proposée par Itamar Even-Zohar et l’œuvre phare de Gideon Toury (Descriptive Translation Studies – and Beyond, 1995).
      Dès lors, de nombreuses études visant à mieux comprendre le processus de traduction ont été réalisées, aussi bien sur des corpus non électroniques (McLaren, 1999, Şerban, 2003) qu’électroniques (Kenny, 2001, Saldanha, 2005, Bosseaux, 2007), profitant de la mise à disposition de vastes bases de données et de la rapidité de calcul et d’accès aux statistiques que permet l’utilisation de logiciels dédiés2. Grâce à ces travaux, nous disposons aujourd’hui d’un appareil méthodologique transparent, reproductible et applicable à toute combinaison linguistique, et à tout genre et type de texte.
     Notre étude souhaite examiner le lien entre narratologie, idéologie et traduction dans une perspective multidisciplinaire, empruntant des modèles narratologiques et linguistiques tels que les outils d’analyse offerts par l’analyse critique du discours (CDA, Critical Discourse Analysis), appliqués au contexte spécifique de la littérature pour enfants. Il s’agit, plus précisément, d’une analyse quantitative et qualitative où des données statistiques contribuent à une meilleure compréhension du processus traduisant. Par le biais d’une série d’exemples, nous montrerons comment, dans le transfert d’une langue à l’autre, la transposition linguistique et culturelle du texte dans un nouveau code et dans un nouveau contexte socioculturel peut impliquer une modification profonde du système de valeurs de l’œuvre de départ. La perspective contrastive multilingue est dans ce cas particulièrement porteuse, car elle permet de mettre en évidence des univers d’attente différents et des stratégies traductives distinctes, selon le public concerné. Une considération particulière sera apportée à la littérature de jeunesse et à ses particularités, en tant que genre aux contours flous, allant de l’album illustré aux publications scolaires, et à cheval entre deux lectorats. Ces œuvres sont en fait susceptibles d’intéresser à la fois les enfants, pour qui elles ont été conçues, et les adultes qui en sont les médiateurs (acheteurs et parfois lecteurs à haute voix pour un très jeune public, mais de plus en plus, également, bénéficiaires directs, comme le montre le phénomène de la crossover literature3, kiddult ou kidult literature, appréciée aussi bien par les adultes que par les plus jeunes). L’étude de la réception de ces œuvres est d’ailleurs centrale pour en comprendre les enjeux, particulièrement en traduction. En effet, comme l’ont montré les études à la croisée de traductologie et narratologie de Schiavi (1996), Hermans (1996 et 2014) et O’Sullivan (2003 et 2005) de nouvelles instances narratives font surface : le rôle du traducteur implicite, qui se superpose à celui du lecteur du texte original, s’adresse à son tour à un nouveau lecteur implicite4 aux caractéristiques complexes. L’analyse de ces instances peut non seulement nous éclairer sur l’image de l’enfant et de l’enfance, mais aussi sur la complexité d’un genre qui touche à la fois au domaine ludique et de l’évasion, inclus dans les programmes scolaires tout en étant avant tout une œuvre de l’esprit, et donc un produit artistique dont la richesse n’a rien à envier à la production littéraire pour adultes.
      L’intérêt pour ce genre littéraire ne cesse d’ailleurs de grandir : le succès de manifestations internationales, comme celle qui a lieu tous les ans à Bologne autour du livre pour enfants (Fiera del Libro per Ragazzi), témoignent de son succès commercial et éditorial, tout comme les nombreuses publications qui, depuis une centaine d’années, dans chaque pays, en illustrent les spécificités et essayent d’en saisir les différentes facettes. La littérature de jeunesse a fait désormais son entrée dans les universités en tant que discipline académique et de plus en plus d’études se penchent sur les enjeux complexes de sa traduction (Oittinen, 2000, Puurtinen, 1994/2006 et 1998, Nord, 2003, Lathey, 2006 et 2010, et beaucoup d’autres).

 

2. The Magician’s Nephew

      The Chronicles of Narnia réunit sept romans écrits par Clive Staples Lewis, publiés au Royaume-Uni entre 1950 et 1956 par les éditeurs Geoffrey Bles et The Bodley Head, et actuellement par HarperCollins. Ce recueil forme, avec sa traduction française, le corpus électronique de notre projet de thèse. Dans le cadre d’une étude pilote visant à mettre à l’épreuve nos outils d’analyse, nous avons choisi de concentrer notre attention sur The Magician’s Nephew (1955), publié en avant dernier, mais placé en ouverture de la série depuis l’édition de 1980, selon un ordre de lecture qui se fonde désormais sur la chronologie interne de l’histoire. La traduction française a été l’œuvre de Cécile Dutheil de la Rochère, et la traduction italienne de Chiara Belliti et Giuseppe Lippi (éditeur). D’autres traductions existent, mais celles que nous avons incluses dans notre corpus ont la caractéristique commune d’avoir été publiées dans un volume unique (dont le paratexte s’inspire de l’original en langue anglaise, notamment pour ce qui concerne le choix du format et de la page de couverture), publié en France pour la première fois par Gallimard en 2005, sous le titre de Le Monde de Narnia ; en Italie, la même année, Mondadori a publié Le Cronache di Narnia.
      Selon certains critiques tels que Schakel (2005) et Giardina (2005), par le biais de Narnia Lewis inviterait son public à ressentir une présence spirituelle dans la nature et dans le monde en général, redonnant vie à des mythes anciens dans un univers teinté de platonisme, de tradition chrétienne et d’éléments féériques, et fournissant au lecteur la possibilité de s’ouvrir à une dimension spirituelle, sans jamais nommer la religion ouvertement. Cette caractéristique est à l’origine d’un double plan de lecture dans lequel le récit, au frontières du genre communément nommé fantasy, se nourrit d’échos bibliques, matérialisés dans The Magician’s Nephew par la présence d’un substrat symbolique évoquant la Genèse. C’est ce message religieux de fond qu’il sera utile d’observer en traduction, en situant les textes traduits dans leurs contextes socioculturels de production. Nos premières découvertes5 ont effectivement mis au jour des tendances quasi opposées entre les traductions françaises et les traductions italiennes, par rapport à l’expérience religieuse du texte source (TS).
      Parmi les sept romans, l’intérêt de The Magician’s Nephew réside dans le fait que Lewis y livre aux lecteurs les détails de la création du monde de Narnia. C’est dans cette œuvre que l’auteur conçoit l’espace narratif au sein duquel toutes les aventures de la saga auront lieu ; notre hypothèse initiale est alors d’y retrouver des éléments intéressants en ce qui concerne les descriptions spatiales et donc le point de vue.

 

3. Idéologie et point de vue

      Pour définir l’espace narratif, le narrateur se sert d’une série de techniques visant à accompagner le regard du lecteur, et le point de vue narratif, ou l’angle sous lequel l’histoire est narrée, constitue une porte d’entrée privilégiée dans le texte, voire la clé de voûte de la narration elle-même (Simpson, 1993, Fowler, 1986/1996, Bosseaux, 2007). Rimmon-Kenan6 (1983, p. 81) et Fowler (ibid., p. 166) reprennent le point de vue sur le plan idéologique, décrit initialement par Uspensky (1973), afin de repérer qui dans le texte véhicule l’idéologie : est-ce le narrateur ou l’un des personnages ? Ou bien, y a-t-il une sorte d’expression chorale de l’idéologie, ou des structures idéologiques différentes et conflictuelles ?
      Suivant Eagleton (1991) et van Dijk (1998), ce que nous entendons par « idéologie » est fondamentalement un phénomène du discours : dans ce sens, elle est souvent identifiée avec les différentes façons dont les signes, les significations et les systèmes de valeurs aident à reproduire et à renforcer un système social. Plus précisément, l’idéologie est le système de croyances, de valeurs et, plus en général, de catégories à travers lequel on appréhende le monde (Fowler, 1996)7. D’un point de vue littéraire, le terme « idéologie » désigne alors le système de valeurs et de croyances qui habitent le texte (Simpson, 1993, p. 5), ou, autrement dit, ses structures axiologiques, révélant le lien étroit qui unit le langage, et notamment l’acte de langage, et son contexte socioculturel de production ; un lien qui a été souligné, en traductologie, par Hatim et Mason (1990 et 1997).
      La Critical Discourse Analysis (CDA), ou Analyse critique du discours, réunit des chercheurs de différents horizons, tels que des linguistes, des sociologues, des psychologues, des hommes et des femmes de lettres, des anthropologues, des ethnologues, dans une dimension multidisciplinaire et autour de sujets controversés comme le racisme, les études de genre ou la critique sociale et politique. Au sein de cette approche, née à la fin des années 1980 comme un développement naturel de la Critical Linguistics ou Linguistique critique, on peut aujourd’hui distinguer un ensemble de perspectives qui ne constituent pas un mouvement compact mais dont les points focaux seraient une conception du langage comme pratique sociale et une importance cruciale accordée au contexte, en tant que cadre discursif dans lequel cette pratique a lieu (Wodak, 2006). La CDA insiste aussi sur le lien entre idéologie, discours et pouvoir : son rapport au pouvoir c’est ce qui distingue l’idéologie d’une philosophie ou d’une croyance quelconque8, et implique tant les stratégies par lesquelles les groupes dominants conservent leur hégémonie que les revendications de groupes minoritaires. Les idéologies s’expriment dans les médias, et le monde éditorial est une des plateformes privilégiées de leur diffusion. Le choix de traduire ou de ne pas traduire un texte est déjà en soi un acte idéologique, de même que le choix d’envisager un certain type de lecteur idéal, en en écartant d’autres, dans un droit à l’inclusion ou à l’exclusion qui concerne aussi les valeurs véhiculées par le texte :

In the context of translating or assessing translations, one sense of power involves using language to “include” or “exclude” a particular kind of reader, a certain system of values, a set of beliefs or an entire culture. (Hatim et Munday, 2004, p. 93)

      L’idéologie exprimée dans le texte source (TS) trouve son écho plus ou moins conforme dans le texte traduit (TT), révélant la présence du traducteur dans le discours narratif et son positionnement, qui est en même temps spatial, temporel et sociopolitique (Tymoczko, 2003, p. 183)9, tout comme l’est d’ailleurs celui du sujet interprétant ou de l’analyste10. Il ne faut pas non plus oublier le rôle des maisons d’édition et de leurs lignes ou politiques éditoriales : pour s’y conformer, des modifications importantes sont parfois apportées aux textes, avant leur publication, sans que les traducteurs en soient directement responsables11.
      Grâce à une analyse critique du discours, l’étude contrastive des effets produits par les marqueurs linguistiques du point de vue mettra au jour les changements survenus dans l’univers narratif entre le TS et le TT (Bosseaux, 2007, p. 17). Les éléments linguistiques clés à travers lesquels mener une étude sur l’idéologie du texte, tels qu’ils ont été utilisés par des chercheurs dans des études similaires (Kenny, 2001, Munday, 2002, Puurtinen, 2003, Şerban, 2003, Bosseaux, 2007), sont : le lexique et la variété lexicale, la transitivité, la modalité, les déictiques, la syntaxe et les phénomènes de la cohésion (référence, répétitions, ellipses, conjonctions, etc.), définis par Hallyday et Hasan (1976). Plus précisément, selon Fowler (1996), les marqueurs du point de vue idéologique, seraient : les auxiliaires modaux, les adverbes modaux et les adverbes de phrase, les adjectifs et les adverbes évaluatifs, les verbes exprimant la connaissance, la prédiction, l’évaluation, les généralités et la transitivité.
      Pour cette étude pilote, et en fonction des caractéristiques narratives de l’œuvre analysée, il nous a semblé utile de nous concentrer initialement sur les déictiques et certains choix lexicaux, ainsi que sur la métaphore, afin de déterminer comment ces éléments s’insèrent dans l’économie du texte, participent à la création et à la définition de l’espace narratif et, plus précisément, à l’ancrage spatio-temporel, dans un contexte riche d’évocations symboliques, et véhiculant, de façon plus ou moins explicite, l’idéologie. Confirmant leur importance dans le genre de la littérature pour enfants (Otten et Schmidt, 1989), l’instance du narrateur et la voix narrative seront au centre de notre réflexion. En parallèle, nous observerons comment le lecteur implicite (re)donne vie au texte, en épousant tantôt le regard d’un personnage, et tantôt l’instance du narrataire, invité par le narrateur à participer en première personne à l’actualisation de l’univers narratif (Eco, 1979).

 

4. Analyse des traductions

4.1 Coefficient de foisonnement et adresses au narrataire

Pour l’étude pilote, nous disposions d’un corpus parallèle bilingue de 30 chapitres (15 en anglais et 15 en français, constitués de 41 599
mots sources et de 41 290 mots cibles). Globalement, le texte traduit par Cécile Dutheil de la Rochère montre donc un coefficient de
foisonnement négatif, fait assez surprenant dans cette combinaison linguistique12: nous nous attendions déjà à l’omission ou à la suppression volontaire de parties de texte dans la traduction française, que l’analyse, en effet, nous a confirmées. À titre de comparaison, les autres traducteurs français de The Chronicles of Narnia montrent des valeurs moyennes de 7,1 % (Philippe
Morgaut) et de 9,5 % (Anne-Marie Dalmais), ce qui correspond à la « norme » en traduction littéraire pour ce couple de langues.

Tableau 1 – Taux de foisonnement dans la traduction française de The Magician’s Nephew

Chapitre

Titre

Mots En

Mots Fr

 

% foisonnement

MN-1

THE WRONG DOOR

3042

3096

 

1,78

MN-2

DIGORY AND HIS UNCLE

2809

3028

 

7,23

MN-3

THE WOOD BETWEEN THE WORLDS

2786

2800

 

0,50

MN-4

THE BELL AND THE HAMMER

2888

2680

 

-7,20

MN-5

THE DEPLORABLE WORD

2776

2724

 

-1,87

MN-6

THE BEGINNING OF UNCLE ANDREW’S TROUBLES

2851

2872

 

0,73

MN-7

WHAT HAPPENED AT THE FRONT DOOR

2973

2994

 

0,70

MN-8

THE FIGHT AT THE LAMP-POST

2625

2652

 

1,02

MN-9

THE FOUNDING OF NARNIA

3090

3131

 

1,32

MN-10

THE FIRST JOKE AND OTHER MATTERS

2682

2701

 

0,70

MN-11

DIGORY AND HIS UNCLE ARE BOTH IN TROUBLE

2693

2599

 

-3,40

MN-12

STRAWBERRY’S ADVENTURE

2856

2698

 

-5,50

MN-13

AN UNEXPECTED MEETING

2786

2620

 

-5,95

MN-14

THE PLANTING OF THE TREE

2462

2462

 

0,00

MN-15

THE END OF THIS STORY AND THE BEGINNING OF ALL THE OTHERS

2280

2233

 

-3,10

 Total

 

41599

41290

 

-0,74

 

Au vu de ces données statistiques, nous avons concentré notre analyse sur les chapitres dont les taux de foisonnement sont négatifs, afin de chercher les raisons de ces particularités. En parallèle, le texte en italien nous a apporté une vision élargie et contrastive du phénomène.
      Dans le premier et le deuxième chapitres, les deux jeunes protagonistes, Digory et Polly, sont obligés par un méchant magicien (l’oncle de Digory) à partir en exploration dans un monde parallèle. Dans le troisième chapitre, les enfants se trouvent au cœur d’une forêt : c’est le premier endroit magique qu’ils découvrent. Il faut rappeler que chez Lewis magie et spiritualité sont indissociables ; toutes ces sources viennent nourrir l’imaginaire de l’auteur pour donner vie à une œuvre (The Chronicles of Narnia) qui a été définie comme la plus imaginative de sa production romanesque, tout en recelant des pensées profondes sur sa conception de la vie et de l’univers (Schakel, 2002).
      En français, l’analyse des textes parallèles nous montre un souci d’économie dans la suppression des répétitions (« perçait » pour « that came through the leaves »), laissant souvent au lecteur la tâche de faire des inférences. Mais les passages descriptifs sont parfois excessivement abrégés et des détails, dont l’importance est quelquefois sous-estimée, omis (en gras dans le TS).

Exemple 1 – Chapitre 3

As he rose to his feet he noticed that he was neither dripping nor panting for breath as anyone would expect after being under water. His clothes were perfectly dry. He was standing by the edge of a small pool — not more than ten feet from side to side — in a wood. The trees grew close together and were so leafy that he could get no glimpse of the sky. All the light was green light that came through the leaves: but there must have been a very strong sun overhead, for this green daylight was bright and warm. It was the quietest wood you could possibly imagine. There were no birds, no insects, no animals, and no wind. You could almost feel the trees growing. The pool he had just got out of was not the only pool. There were dozens of others — a pool every few yards as far as his eyes could reach. You could almost feel the trees drinking the water up with their roots. This wood was very much alive. When he tried to describe it afterwards Digory always said, “It was a rich place: as rich as plum cake.” (The Magician’s Nephew, p. 25, 195 mots)

 

Il se redressa sur ses pieds mais, curieusement, il n'était ni trempé ni à bout de souffle [Ø]. Ses vêtements étaient parfaitement secs. Il était debout au bord d'une petite mare – à peine trois mètres de longueur –, au milieu d'un bois dont les arbres étaient si rapprochés et le feuillage si dense qu'il était impossible d'apercevoir le moindre éclat de ciel. Seule perçait cette lumière verte. Plus haut, le soleil devait être très fort car c'était une lumière [Ø] très intense, une lumière chaude.

Le bois était d'un calme inimaginable. [Ø] L'on pouvait presque sentir les arbres pousser. La mare dont Digory venait d`émerger n'était pas la seule : il y en avait des dizaines – une tous les cinq ou six mètres, à perte de vue. Et l'on pouvait presque sentir les arbres boire l'eau de la terre à travers leurs racines. C'était un bois qui dégageait une impression de vie. Plus tard, quand il tentait de le décrire, Digory disait toujours : « C'était un endroit compact, aussi compact que du plum-cake. » (Il Nipote del mago, p. 24, 171 mots)

Si alzò in piedi e si rese conto di non gocciolare e di non avere l'affanno, cosa comune a chi, sott’acqua, deve trattenere il respiro. I vestiti erano perfettamente asciutti. Si guardò intorno, incuriosito: si trovava sulla riva di una pozza di circa tre metri di diametro, in mezzo a una foresta. Gli alberi erano fitti e frondosi, tanto da oscurare la vista del cielo. Attraverso le foglie filtrava soltanto una luce verde, ma Digory pensò che al di sopra degli alberi il sole dovesse brillare in tutta la sua potenza, visto che la luce verde era viva e calda.

Era la foresta più silenziosa che si potesse immaginare. Non c’erano uccelli, insetti o altri animali e non soffiava un alito di vento. Si potevano sentire gli alberi che crescevano, pensate! Guardandosi intorno, Digory notò che lo stagno dal quale era emerso non era l’unico della foresta. Ce n’erano a dozzine, uno a pochi metri di distanza dall’altro, a perdita d’occhio, e si sentivano addirittura gli alberi che si abbeveravano con le radici. Insomma, Digory ebbe l’impressione di trovarsi in una foresta vivente. In seguito, ogni volta che ebbe occasione di parlarne, disse sempre: “Oh, era un posto così ricco. Quasi come un dolce con i canditi e l’uvetta.” (Il nipote del mago, pp. 28-29, 209 mots)

      La subordonnée « as anyone would expect after being under water », par exemple, est un rappel au jeune lecteur du fait que Digory vient de plonger dans l’eau et que, au lieu de se retrouver au fond d’une mare, il se retrouve dans un monde inconnu. Sa suppression dans le texte français (TF) rend cette information implicite. En revanche, la traductrice italienne choisit une stratégie diamétralement opposée, en simplifiant le texte : des ajouts (« Si guardò intorno, incuriosito ») explicitent la présence de Digory et son rôle de focalisateur, et transforment des phrases qui évoquent le style indirect libre en descriptions relatées par la voix d’un narrateur omniscient (« ma Digory pensò »).
      La sensation de vie débordante (et de mystère) dont Digory fait l’expérience (malgré l’absence évidente de formes vivantes, telles que des animaux ou l’air environnant, symbolisée par l’absence de vent, métaphore du souffle vital), et qui semble provenir puissamment de l’eau et du monde végétal qui y puise son énergie, comme dans un monde au commencement de la vie, devient dans le TF une « impression ». Et si la traduction italienne (TI) module cette phrase par le même terme, nuancé ultérieurement par l’adverbe quasi, le passage se conclut dans un sentiment de « richesse », comme dans le TS : la même richesse qu’évoque « un gâteau aux fruits confits et au raisin sec » (explicitation13 pour plum-cake), tandis qu’en français, cela se réduit à quelque chose de « compact ».
      La définition du cadre narratif passe par une série d’éléments qui en tracent les contours. Ainsi, dans l’Exemple 1, « as far as his eyes could reach » apporte au lecteur une série d’informations importantes : en premier lieu, les mares (sortes de seuils pour accéder à d’autres mondes) étaient partout aux alentours et à perte de vue ; deuxièmement, le personnage véhiculant le point de vue était Digory (déictique his). Les deux traductions omettent cette deuxième information (« à perte de vue », « a perdita d’occhio ») quoique le TI compense ce manque par les ajouts que l’on vient de citer.
La même expression, à connotation spatiale et visuelle, est supprimée, dans le TF, dans un autre passage :

Exemple 2 – Chapitre 5

And on the earth, in every direction, as far as the eye could reach, there spread a vast city in which there was no living thing to be seen. (The Magician’s Nephew, p. 40, 29 mots)

Sur la terre, dans toutes les directions, [Ø] s'étendait une vaste cité où l'on ne distinguait pas le moindre être vivant. (Le Neveu du magicien, p. 40, 21 mots)

In basso, sulla terra, si stendeva a perdita d’occhio una grande città, completamente disabitata e priva di ogni forma di vita. (Il nipote del mago, p. 52, 21 mots)

      Les exemples de ce genre sont nombreux et même si, comme nous avons vu, la suppression peut être parfois justifiée dans le souci d’éviter une répétition14, elle a certainement une implication dans la compréhension et l’interprétation du texte. Dans l’Exemple 2, qui concerne notamment le point de vue spatial, sa suppression prive la scène de précision et élimine à la fois les frontières du cadre narratif, et une indication précieuse pour le lecteur implicite, dont le regard est guidé, dans le TS, aussi loin que possible, pour embrasser tout l’espace environnant. Le TI, préfère encore une fois une stratégie d’étoffement, par l’ajout de in basso, apportant au lecteur le plus de renseignements possibles et, d’une certaine manière, en lui simplifiant la tâche, en ce qui concerne le rôle actif de coopération interprétative qu’Eco (1979) a attribué à son lecteur modèle, dans le processus d’actualisation du texte.
      Si nous considérons maintenant l’instance du narrateur, dans le TS la voix narrative s’adresse directement au narrataire par le you générique qui, tout en étant une entité vague, lui confie un rôle actif dans l’économie du texte, comme une invitation à participer en première personne aux événements rapportés par la narration. Ce pronom est traduit généralement par « on » impersonnel en français, mais peut parfois disparaître par le biais d’une modulation15. Pour des raisons linguistiques qui ne laissent pas toujours de choix en traduction, le texte français se montre alors plus lointain, moins inclusif, et semble parfois « se suffire » à soi-même, comme dans l’Exemple 1, où le bois « le plus calme qu’on puisse imaginer » (« it was the quietest wood you could possibly imagine ») devient « d'un calme inimaginable », lorsque l’adjectif épithète remplace la subordonnée. Tout en préservant le sens et en aboutissant à une traduction économe et synthétique16, cette modulation exclut du cadre tout sujet observateur. Dans une tendance contraire, le TI n’hésite pas à ajouter des segments pour impliquer davantage son lecteur, comme dans l’appel au narrataire de l’Exemple 1 (pensate !) dans un registre proche de l’oralité et dans le but de créer une complicité entre auteur implicite et lecteur implicite, tout en renforçant l’effet d’enchantement de la scène. On peut remarquer, toutefois, comme deux autres occurrences ont été traduites dans le TF « à la lettre », même si elles représentent une répétition (« l'on pouvait presque sentir »). S’il est difficile de dégager une tendance générale dans ces scènes descriptives, quelle place est laissée au lecteur implicite dans les passages à inspiration biblique, si chers à leur auteur ?

 

4. 2 Idéologie et point de vue dans les références bibliques

      Au vu de ces résultats, et étant donné d’une part le but éducatif de la littérature de jeunesse17 et d’autre part la laïcité en tant que spécificité française, il nous a paru utile de nous concentrer sur les nombreux échos bibliques dans le texte afin de vérifier s’ils ont été restitués en traduction ou supprimés, et surtout s’ils y sont aussi évocateurs, en matière de ce que Simpson décrit comme feel of the text (1993).
      The Magician’s Nephew est un roman écrit à la troisième personne. De façon générale, par le biais d’un narrateur hétérodiégétique, la voix narrative emprunte une focalisation interne, adoptant le regard de l’un ou de l’autre des personnages (mode réflecteur), ou externe ; le narrateur exprime alors ses propres jugements (mode narratif), et/ou il s’adresse directement au narrataire. Ces interventions créent un dialogue, comme nous l’avons vu dans les exemples précédents, et une complicité entre l’auteur implicite et le lecteur implicite. Elles ont parfois un but moralisant.
      Une comparaison des extraits avec la traduction italienne a permis de mettre en évidence des horizons d’attentes différents pour les deux publics transalpins, et une différence de contextes socioculturels. Par exemple, dans le long passage qui narre la création de Narnia (chapitres 8 et 9), la suppression, en français, de beaucoup de phrases adressées au narrataire et contenant des verbes qui expriment une sensation (see, look, hear, listen, feel...) ou un processus mental (imagine, forget, think...) rend l’expérience de lecture bien différente d’une langue à l’autre.

Exemple 3 – Chapitre 8

The new stars and the new voices began at exactly the same time. If you had seen and heard it, as Digory did, you would have felt quite certain that it was the stars themselves which were singing, and that it was the First Voice, the deep one, which had made them appear and made them sing. (The Magician’s Nephew, pp. 61-62, 57 mots)

Les [Ø] étoiles et les [Ø] voix avaient surgi exactement au même moment, comme si c'étaient les étoiles qui chantaient sous la direction de la Voix principale, la voix basse. (Le Neveu du magicien, p. 63, 28 mots)

Le nuove stelle comparvero insieme alle [Ø] voci che cantavano la sublime melodia. Se aveste avuto la fortuna di assistere a uno spettacolo del genere, come Digory, avreste certamente pensato che fossero le stelle a cantare e che fosse stata la prima voce, quella profonda, a farle apparire e a dar loro l’ordine di intonare l’inno. (Il nipote del mago, p. 84, 55 mots)

      Le lecteur implicite, pris à témoin de la naissance de ce nouveau monde, semble tenu à distance dans le TF. La subordonnée « comme si c'étaient » introduit un doute, absent dans le TS, et une analyse des choix lexicaux illustre mieux la manipulation qu’a subie le texte : en effet, l’action de démiurge de la First Voice, devenue la « Voix principale » en français, tout en étant aussi et surtout la voix « première », « primordiale », est annulée. « Basse » et deep, profonde, ne couvrent pas tout à fait le même champ sémantique. Cet adjectif qualifie la voix créatrice d’Aslan, image du Dieu créateur, et qui ne s’est pas encore révélé en tant que personnage dans le récit. À la fin du chapitre 9, après qu’il sera entré en scène sous la forme d’un lion, ce même adjectif sera traduit de façon appropriée. En italien, en revanche, une analyse de la modalité montre une supériorité et un pouvoir encore majeur attribués à la First Voice, qui semble donner aux étoiles « l’ordre » de chanter.     
      Le TI explicite certains éléments du passage, soulignant les connotations religieuses laissées implicites dans le TS : nous lisons ainsi sublime melodia et un terme liturgique tel que inno, absents dans le TS. La quasi-certitude du TS (quite certain) devient une certitude absolue en italien (certamente) et le narrateur exprime même un jugement par « Se aveste avuto la fortuna di assistere... », se positionnant de façon claire quant au système de valeurs véhiculées par le texte. La régularité de ces démarches radicalement opposées, dans les deux traductions, pourrait être démontrée par de nombreux exemples, et aussi dans d’autres romans de la série18.

Exemple 4 – Chapitre 8

The earth was of many colours: they were fresh, hot and vivid. They made you feel excited; until you saw the Singer himself, and then you forgot everything else.
It was a Lion. (The Magician’s Nephew, pp. 62-63, 33 mots)

La terre offrait une gamme de couleurs variées, vives et chatoyantes, qui procuraient au spectateur un irrésistible sentiment d'excitation... jusqu'au moment où celui-ci découvrait la source du chant et oubliait instantanément tout le reste.
C'était un lion. (Le Neveu du magicien, p. 64, 37 mots)

La terra era ricca di colori brillanti, caldi, luminosi, e i nostri amici ne furono affascinati, almeno fino a quando videro colui che cantava, perché allora dimenticarono tutto il resto.
Era un leone. (Il nipote del mago, p. 85, 33 mots)

 

      Ce dernier exemple relate l’apparition d’Aslan. Si le narrataire est pris directement à partie dans le TS, dans la forme à la deuxième personne, typique de la langue anglaise, le déictique disparaît en français jusqu’à devenir un « spectateur » anonyme. La périphrase « source du chant », personnifiée en italien (« colui che cantava »), nous semble ôter de la vigueur et de la majesté au Singer, qui s’avère être Aslan, le lion. Le TI, par un autre procédé, déplace la focalisation directement sur les personnages principaux, en les caractérisant de nostri amici, et en enrichissant le texte d’une connotation affective et d’une proximité émotionnelle qui invite à s’identifier avec eux.
     Dans une scène si symbolique, évoquant la Genèse, la suppression dans le TF des phrases adressées au narrataire et une modification dans le système des déictiques personnels produisent un effet de distanciation du point de vue, réduisant l’implication du lecteur dans les événements. La traduction italienne a tendance, en revanche, à exalter les échos religieux du texte et à expliciter l’implicite. De nombreux exemples, centrés sur les déictiques temporels et spatiaux, nous confortent dans notre interprétation. Le TF a tendance à modifier sensiblement le point de vue de l’original et cela n’est pas sans conséquences en ce qui concerne l’idéologie, car ces choix privent de vigueur des images qui sont évocatrices du substrat biblique. On assiste effectivement, à des degrés différents, à une perte de l’ancrage spatio-temporel de la narration créé par les déictiques, comme l’ont déjà observé Şerban (2003) et Şerban et Mason (2004) dans la traduction du roumain vers l’anglais, et Bosseaux (2007) dans la combinaison anglais vers français. Il nous semble que ce phénomène doit être contextualisé, sa fonction étant cruciale pour l’économie du texte et notamment dans le transfert du système axiologique de l’original et donc de l’idéologie.

 

Conclusion

Les interventions de la voix narrative et la précision des détails descriptifs, grâce à la présence des déictiques ainsi que de choix lexicaux pertinents, permettent au lecteur de construire un cadre spatio-temporel précis et sont des véhicules puissants pour l’idéologie du texte. En modifiant ce système narratif, l’expérience de lecture se trouve profondément changée. À la base de l’idéologie qui caractérise les deux traductions, nous retrouvons des valeurs différentes. Elles apparaissent dans des stratégies traductives visant, d’une part, à éloigner le regard du lecteur implicite, privant de vigueur les références bibliques et laïcisant le texte, dans un univers narratif moins précis et plus lointain, qui demande un effort majeur en ce qui concerne les inférences ; tandis que d’autre part, les choix traductifs du TI mettent sciemment en avant le message religieux sous-jacent, le rendant plus explicite, et enrichissent le texte par une série d’ajouts, en simplifiant son interprétation. Ces réflexions concordent avec la position que ces deux cultures ont face au religieux : la laïcité française, dans le cadre de l’éducation, mais aussi de la vie sociopolitique en général, contraste avec la symbolique catholique dont la société italienne est imprégnée et qu’elle vise à promouvoir, y compris chez les jeunes générations. Les choix des traductions vont, chacun, à la rencontre d’un univers d’attente très précis et ils semblent s’y conformer. Il serait utile de considérer également, et de façon approfondie, les enjeux de l’image de l’enfant dont se nourrissent ces deux traditions et de voir en quoi ils peuvent influencer ces mêmes choix. Ce regard croisé sur des cultures et des traditions distinctes permet ainsi de mettre en évidence des lecteurs modèles spécifiques, nous questionnant également sur la frontière qui sépare adaptation, réinterprétation culturelle et manipulation.

 

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1. Le nom de l’école a pour origine une collection d’essais édités en 1985 par Theo Hermans et dont le titre est The Manipulation of Literature: Studies in Literary Translation, un concept central étant que toute traduction implique un certain degré de manipulation du texte source (Hermans, 1985).

2. Pour cette étude et pour le projet de thèse, Wordsmith Tools, version 6.0.

3. Voir par exemple Falconer, Rachel. The Crossover Novel: Contemporary Children's Fiction and Its Adult Readership. New York, Routledge, 2009.

4. Voir également Mambrini, 2010, Pederzoli, 2012 et Artero, 2014.

5. Voir Şerban et Artero, 2013.

6. “The ideological facet [...], often referred to as ‘the norms of the text’, consists of ‘a general system of viewing the world conceptually’, in accordance with which the events and characters of the story are evaluated”. (Rimmon-Kenan, 1983, p. 81).

7. « The system of beliefs, values and categories by reference to which a person or a society comprehends the world » (Fowler, 1996, p. 165).

8. Eagleton, op. cit., p. 5.

9. « The ideology of a translation resides not simply in the text translated but in the voicing and stance of the translator, and in its relevance to the receiving audience. These latter features are affected by the place of enunciation of the translator : indeed they are part of what we mean by the ‘place’ of enunciation, for that ‘place’ is an ideological positioning as well as a geographical or temporal one » (Tymoczko, 2003, p. 183).

10. « All interpretations are in some sense context-bound and are contingent on the position of the analyst relative to the text. » (Simpson, 1993, p. 3). Voir aussi Şerban et Artero, op.cit.

 11. Voir Mambrini, op.cit.

12. Pour rappel, en traduction et dans un texte donné, le coefficient de foisonnement est le rapport entre mots sources et mots cibles, exprimé en pourcentage. Pour le taux de foisonnement dans la combinaison « anglais vers français » voir Cochrane, 1995 et Vinay et Darbelnet, 1977.

13. Nous avons remarqué que, dans la traduction en italien des références gastronomiques, cette stratégie est utilisée constamment tout au long du recueil, dans un clair souci naturalisant.

14. Pour ce qui concerne les répétitions, Wordlist, la fonction de création de listes de mots de Wordsmith, a permis d’identifier les substantifs les plus fréquents et d’observer la composition des textes en termes statistiques, afin d’observer les correspondances ou les écarts en traduction. La liste des noms propres montre, par exemple, que les prénoms des personnages utilisés comme focalisateurs, tels que Digory et Polly, ont une fréquence mineure dans la traduction française, et analysant le phénomène de plus près dans le fichier aligné on remarque une certaine résistance à les répéter dans le TF, ce qui expliquerait en partie le nombre inférieur d’occurrences.

Le choix d’éviter la répétition en traduction a été décrit comme l’une des caractéristiques les plus communes du texte traduit (déjà observée par Toury, 1995). En général, la répétition est contournée à l’aide de la suppression de texte ou de la reformulation. Dans un dialogue, l’effet atteint en traduction est celui d’une intrusion moindre de la part du narrateur, qui évite de préciser à chaque fois le personnage prenant la parole ; Simpson l’a appelé « discours direct libre » (Free Direct Speech) (1993, p. 25).

15. Chuquet et Paillard, 1987.

16.  En traductologie, la règle du Minimax, introduite par Levý (1967) recommande d’opter pour la solution qui apporte le maximum d’effet en traduction, tout en demandant le minimum d’effort de la part du destinataire du message. Une quantité de mots réduite peut satisfaire ce principe, si cela n’implique un effort de compréhension plus élevé. Vinay et Darbelnet (1977, p. 184) définissent le principe d’économie comme un « resserrement de l’énoncé obtenu par la réduction, en nombre ou en étendue, des signes qui le composent. Il y a économie dans un segment de l’énoncé lorsque le même signifié est porté par un signifiant allégé ».

17. Puurtinen, 1988, O’Sullivan, 2005, Elefante, 2010, Pederzoli, 2012.

18. Şerban et Artero, op. cit.

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